dimanche 15 avril 2012

L'arrivée d'une LGV à Bayonne aurait un impact sur les prix. Décryptage

Rapidité, dessertes, tarifs, direction, facilité d'accès aux villes proches ou éloignés : si la LGV voit le jour, à quelle sauce les usagers des transports en communs d'aujourd'hui et de demain vont-ils être grignotés ?

1 Plus de trains pour les usagers locaux ?

Pour qu'une ligne nouvelle à grande vitesse ait des chances d'être utile à l'ensemble du territoire, et non pas seulement à un périmètre restreint autour de la gare, il faut que les accès à la gare de Bayonne, la future gare LGV, soient simples et bien cadencés (lire par ailleurs).

Selon Christian Maudet, le directeur du projet GPSO pour Réseau ferré de France (RFF), le trafic « va déjà augmenter beaucoup, ce dès 2017, dans la continuité de la mise en service de la ligne LGV Tours-Bordeaux. » Il compte aujourd'hui « 20 à 25 TER allers-retours en moyenne par jour, et une dizaine de trains grandes lignes. » Et demain ?

Selon RFF, à terme, le nombre de TGV qui desserviront le Pays basque va doubler. « Les gares ne seront pas desservies par tous les TGV. Les dessertes internationales représenteront un tiers de ces trains. Les deux autres tiers reprendront la ligne actuelle et desserviront les gares jusqu'à Irun. Cela devrait représenter 25 trains par jour », assure Christian Maudet. Parmi ces TGV internationaux, « deux ou trois par jour ne s'arrêteront pas à la gare de Bayonne, les autres, au nombre de 5 ou 6, oui ».

2 Un tram-train vers Saint-Sébastien ?

Maintes fois évoqué, jamais réalisé, le tram-train transfrontalier entre Bayonne et Saint-Sébastien verrait-il enfin le jour à l'occasion des aménagements prévus dans la perspective d'une amélioration de la desserte secondaire en parallèle à la LGV. Selon le Bayonnais Mathieu Bergé, président de la commission infrastructures à la Région, plusieurs options sont étudiées. « Pour le transfrontalier, le tram-train, c'est-à-dire un train qui peut s'adapter sur des voies de tramway, est une option possible. » Autres options : « Le transport périurbain », à savoir un train avec de nombreux arrêts, ou encore « l'intercité », plus direct, avec peu d'arrêts jusqu'à Saint-Sébastien. L'élu estime que « le périurbain serait adapté ici, entre Dax et la frontière, et l'intercité à une ligne Hendaye- Saint-Sébastien. »

3 Le temps, c'est de l'argent

Difficile de prédire l'impact exact de la mise en place d'une LGV sur le prix des futurs billets. Sur les trains les plus rapides, on peut d'ores et déjà tabler sur une augmentation notable.

Les exemples, un peu partout en France, le montrent. Les membres du Cade, ce collectif associatif en lutte contre la LGV, citent ainsi « un voyage entre Strasbourg et Montpellier qui coûtait 50 euros avant la LGV et 108 euros aujourd'hui avec la LGV, pour un gain de temps de 1 h 10 ».

Entre Saint-Pierre-des-Corps et Paris, les voyageurs peuvent choisir un TGV direct en une heure ou la ligne classique avec arrêts, en 2 heures. La différence tarifaireentre les deux trajets est d'environ 25 % en période normale, mais en période de pointe, le TGV peut être deux fois plus cher. Une différence qui a de quoi rebuter, voire exclure de la grande vitesse les plus modestes.

Selon, Christian Maudet ces comparaisons ne suffisent pas à prédire les tarifs de demain, ici, sur la ligne à grande vitesse. « L'augmentation des prix correspondra à la valeur qu'on donnera au temps gagné. Admettons que la minute gagnée a une valeur de 2 euros. Si un train vous fait arriver 40 minutes plus tôt, on estime que vous en gagnez 80. Actuellement, on considère que l'usager est prêt à consacrer un tiers de ce gain pour aller plus vite. »

La complexité du calcul va au-delà, car, souligne-t-il, « les tarifs sont ensuite équilibrés pour ne pas devenir rédhibitoires ». Les usagers auront donc le choix entre plusieurs tarifs, selon le type de train qu'ils choisiront de prendre. Une constante : plus leur train sera rapide, plus le billet sera cher.

4 Un ticket unique pour plusieurs transports

C'est en projet à la Région, qui porte le nom nébuleux d'« interopérabilité billétique », mais cela pourrait faciliter la vie du voyageur de demain. Et surtout l'inciter à circuler en utilisant différents modes de transport en commun, en plus de la LGV : un billet transversal. Un titre de transport unique pour tout le réseau de transports en commun d'Aquitaine. Dans l'idéal, le voyageur pourrait partir de Saint-Jean-Pied-de-Port, prendre son TER jusqu'à Bayonne, la LGV jusqu'à Bordeaux, où, toujours avec le même billet, il monterait dans le tramway et en descendant de celui-ci emprunterait un VCub (vélos en libre-service). « Nous travaillons à sa mise en place, signale Mathieu Bergé, et avons signé une convention avec 20 autorités organisatrices de transports. »

5 Avion, LGV et low-cost : des inconnues

Pourquoi prendre la LGV plutôt que l'avion qui restera, au moins sur le papier, plus rapide pour certaines grandes liaisons ? Christian Maudet ne s'en cache pas : « Pour un Paris -Madrid, par exemple, qui met 6 heures au lieu de 10 h 30 aujourd'hui, le train ne sera pas dans la fourchette où il est compétitif pour les citoyens. » Sur un futur trajet en train Bayonne-Paris (3 heures) contre un vol Biarritz-Paris (une heure), le train devrait être gagnant. « Actuellement, les gens font la bascule vers l'avion, si le train met plus de 3 h 30 pour un trajet. »

Mais le prix du train devra être incitatif par rapport à l'avion. Impossible aujourd'hui d'en être certain. C'est Christian Maudet qui le dit : « Ce qui est difficile pour calculer la rentabilité du train par rapport à l'avion, c'est qu'on ne sait pas comment va se développer l'avion à l'avenir et notamment les compagnies de vols low-cost. » À l'inverse, l'ouverture des rails à la concurrence, et peut-être à des compagnies low-cost ferroviaires, pourrait elle aussi alléger le porte-monnaie de l'usager.